Accueil > Actualités > Le conseil municipal éclate (encore !!) en vol
Conseil municipal du 8 décembre 2017 (1)
Et cette fois c’est plus grave.
Après une série d’actes, les uns pénalement douteux, les autres administrativement contestables, de la part du maire et de sa fragile majorité, les conseillers d’opposition se retirent. Bien qu’il n’y ait plus le quorum (le nombre d’élus minimum en séance, faute de quoi le conseil ne peut plus délibérer), le maire fait voter par sa minorité de partisans encore un rapport, puis interrompt le conseil.
Le conseil a juste eu le temps :
D’examiner (enfin !) les comptes-rendus des conseils des 12 juin, 5 et 10 juillet, et 18 septembre. Ces comptes-rendus, seuls, peuvent donner une valeur juridique à ce qui s’est passé lors de ces séances
De débattre du rapport 2017 sur le développement durable.
De discuter sur la valeur ou non de LA page constituant le rapport d’orientation budgétaire qui nous est présenté.
Nous parlerons dans un autre billet du développent durable. C’est sur les autres sujets que se sont produits les incidents.
C’est lors de ce conseil que, souvenons-nous, le maire a fait voter le « protocole de préfiguration » du projet de rénovation urbaine du quartier Lebon-Lamartine. Et cela par une minorité de 20 voix sur 44 présents et représentés au début de la séance, tous les autres conseillers municipaux étant sortis pour une suspension de séance (qui est de droit), afin d’entendre les habitants du quartier.
À la suite de ce vote irrégulier, le Conseil Territorial du Grands-Orly-Seine-Bièvre (GOSB) avait avalisé la pseudo-décision de Villejuif : la droite avait voté pour, la gauche s’était abstenue. Devant la protestation des élus de gauche, écologistes et En Marche de Villejuif, le président du GOSB a déclaré que, après enquête, on aviserait. Mais nous ne pouvions rien faire faute de compte-rendu officiel.
Et voici qu’enfin nous devons voter sur ce fameux compte-rendu. Il présente de façon erronée ce qui s’est déroulé ce soir-là et conclut en signalant que « plusieurs conseillers municipaux protestent » et que le rapport est adopté par « 20 voix pour » sans pouvoir expliquer où sont passés les autres votes !
Au nom du groupe L’avenir à Villejuif, j’explique en substance : Ce compte-rendu est mensonger. S’il était adopté, il pourrait être considéré un faux en écriture publique, car il a une conséquence juridique : l’adoption du protocole de préfiguration par le Conseil Territorial du Grand Orly Seine Bièvre. Donc : ou bien vous l’amendez et reconnaissez la vérité, ce qui motivera un nouvel examen par le GOSB, ou bien vous le votez, et nous signalerons à la Procureure de la République que nous suspectons un nouveau faux en écriture publique par personne investie d’autorité publique.
Franck le Bohellec : Je ne modifie pas le compte-rendu, et si vous signalez à la Procureure je vous attaque en diffamation. F. le Bohellec devrait pourtant savoir que cela ne nous a jamais détourné de notre devoir vis-à-vis des habitants.
On passe au vote, le maire décroche une majorité de 22 voix, quelques abstentions, le reste contre : le compte-rendu est adopté, le faux parait constitué, nous en aviserons la Procureure de la République.
Et d’un.
Le débat d’orientations budgétaires, qui se conclut par un « dont acte » (le conseil reconnaît que le débat a eu lieu) est une étape essentielle de la vie municipale, qui précède le vote du budget proprement dit. L’an dernier il a eu lieu le 19 mars pour l’année en cours, car nous ne connaissions pas encore les revenus fiscaux de la commune, et le budget [voté le 31 mars].
Dès le 28 novembre, le rapport d’orientations budgétaires pour 2018 est présenté en première commission (finances). Nous faisons observer que ce rapport de quelques pages est essentiellement consacré à une rétrospective des années antérieures. Puis, UNE page sans chiffre, intitulée « orientations budgétaires », se contente d’étaler quelques phrases creuses sans aucune précision, même grossière, sur le partage entre dépenses de fonctionnement, d’investissement et emprunts, sans même parler d’évoquer ce qui sera investi ou vendu, quels services seraient développés ou supprimés etc. Par ailleurs, il n’y a pas, contrairement à la loi, de rapport annuel sur l’égalité hommes-femmes.
Les conseillers (membres de la première commission) s’indignent et annoncent que si aucun document complémentaire n’est fourni d’ici le conseil, nous voterons contre le « dont acte », signifiant ainsi que le débat d’orientations budgétaires n’a pas eu lieu. Le maire devra nous faire parvenir les compléments cinq jours avant le conseil du 8 décembre : il a encore le temps…
Le soir du 8 décembre, on en est toujours là. Aucun document nouveau ne nous est parvenu. Rien sur nos tables. Là-dessus, le maire se lance dans la lecture d’un texte à toute vitesse, tout en faisant projeter à l’écran une douzaine de diapositives couvertes d’une avalanche de chiffres, tableaux et graphiques, racontant on ne sait pas quoi au juste (impossible de lire à une telle vitesse ces documents en petits caractères), mais en tout cas prospectifs, apparemment jusqu’à 2020 ou 21 ! Il y a même (slide 9 ) des chiffres sur l’égalité hommes-femmes…
Vives protestations dans l’assistance : Mais qu’est-ce que c’est que ça ? On n’a jamais vu ces documents ! Plusieurs conseillers et une partie du public se précipitent avec leurs smartphones pour photographier les images qui se succèdent à l’écran, en espérant que ce sera assez net pour pouvoir les analyser ce week-end à tête reposée.
Tous les groupes d’opposition annoncent qu’ils ne peuvent « donner acte » qu’un débat d’orientation budgétaire a eu lieu.
Le maire adjoint E. Obadia, habituel préposé aux basses œuvres, « justifie » la manœuvre du maire : Tous les graphiques qui vous sont projetés étaient contenus dans le rapport que vous avez eu il y a dix jours. On lui rétorque : Nous n’avons pas vu grand chose, mais ces graphiques portent sur 2018 et les années suivantes, les graphiques du rapport écrit que nous avons s’arrêtent en 2017. Et il y a des tableaux sur l’égalité hommes-femmes, alors qu’il n’y en a pas dans le rapport que vous nous avez envoyé !
Je signale au maire-adjoint : Vos mensonges sont enregistrés et pourront servir dans un contentieux. Mais puisque rien n’est écrit ce n’est sans doute pas un « faux en écriture publique » et d’ailleurs ces mensonges seront sans conséquence juridique…
C’est Jean-François Harel qui traduit le mieux l’impression générale : Mais pourquoi faites vous ça ? Pourquoi massacrer la démocratie à Villejuif ? Vous n’aviez qu’à dire « nous n’avons pas encore les éléments pour vous présenter un rapport d’orientation budgétaire, on fera ça au conseil municipal de janvier ou de février. »
Pourquoi, oui, pourquoi cette précipitation ? Nous en discuterons à la sortie. Selon des « fuites », le maire voudrait aller vite dans le vote du budget (qui sera probablement insincère, comme d’habitude) car il lui faut se décider à compléter son équipe de maires-adjoints. Au moins 4 personnes guignent les places, il les leur aurait promis pour garder leurs voix mais ne peut en distribuer que deux, or il a besoin que les quatre votent le budget : c’est à cela que tient sa majorité de 23 voix… Si ce n’est pas vrai, c’est bien trouvé !
Le PS demande un suspension de séance pour discuter quoi faire.
FlB : Non.
PS : Mais c’est de droit, article 22 du règlement intérieur.
FlB : Le règlement vous donne le droit de le demander, et moi je vous réponds non.
(Une telle interprétation des textes revient à jeter à la poubelle une montagne d’articles de la loi et de la Constitution, depuis la fondation de la Première République, y compris tous les droits fondamentaux tels la liberté d’expression, de manifestions, d’aller et venir, etc… En France, « on peut » = on a le droit. Chez le petit Kim-il-Bohellec de Villejuif, « on peut » = cause toujours.)
Des estafettes vont discuter entre les groupes d’opposition : il vaut mieux laisser faire le vote, pour que la faute soit constituée - ou non. De toute façon nous ne pouvons pas interrompre ce cirque en quittant la salle et en « faisant tomber le quorum » : cela ne peut être fait qu’avant que le prochain débat ne soit ouvert.
On passe au vote. Il donne : 22 pour, 1 abstention, 22 contre le « dont acte ». Dans ce cas, la voix du maire est prépondérante. Le « dont acte » irrégulier est donc voté.
Écœurés, les élus d’opposition se lèvent pour quitter le conseil. Il n’y a plus le quorum. Alors que les derniers quittent la salle, le maire lance précipitamment un autre vote, celui qui fixe des amendes de stationnement particulièrement dissuasives. Nous photographions le petit groupe resté en salle avec le maire et le panneau d’affichage qui annonce « 22 pour » et pas de contre, ni d’abstention…
Comment l’ex-majorité de M. le Bohellec est-elle tombée au dessous du seuil majoritaire de 23 voix (sur 45 élus) ? Alors que je sors, la maire-adjointe aux ressources humaines, Laurence Loudière, me confie : « Je me suis abstenue, j’en ai assez, de toute façon ils ne me communiquent plus aucun dossier et ne me m’associent pas à leur décisions. »
Dehors, petit débriefing : outre le signalement du faux à la Procureure de la République, les deux derniers votes sont attaquables devant les tribunaux administratifs. On se donne rendez-vous pour en discuter.
La journaliste du Parisien, est restée dans la salle, penchée sur son ordinateur. Rentrés à la maison, on se connecte. Son article est déjà en ligne : il raconte avec une parfaite objectivité et compétence ce qui vient de se passer…
Chapeau, Madame.
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