Accueil > Thémes > Urbanisme > La réunion Habitat du PLU : compte-rendu
Le 15 décembre avait lieu la première des réunions thématiques préparatoires à la révision du PLU. Une centaine de personnes s’entassaient dans la salle du Conseil municipal.
D’abord Mme Barbara Cipolat, responsable de l’Observatoire du Logement à Villejuif, puis Mathieu Douerin, du service de l’Urbanisme de la Ville, présentent l’état des lieux et les projets dans les tuyaux jusqu’à 2018. Ils s’appuient sur des graphiques, cartes et tableaux que vous pouvez retrouver ici. Ça défile très vite ! Mais vous pouvez relire tranquillement : ça remet bien les choses à leur place.
Villejuif est une ville pauvre, plus pauvre et avec un taux de chômage plus élevé (et en forte augmentation) que la moyenne française, ou du Val de Marne, ou de l’Ile de France. Ce sont les catégories « ouvriers et employées » qui croissent le plus, alors que Villejuif est déjà plus populaire que la moyenne du Val de Bièvre.
Mais c’est une ville en expansion, grâce à son solde de naissances, et depuis 2006 grâce à l’arrivée de nouveaux habitants. (On a eu, depuis, le chiffre 2014 : 56500 habitants). Elle rajeunit plus vite que le Val de Bièvre ou que le Val de Marne (qui vieillit). Et surtout la taille des ménages s’y accroit alors qu’elle baisse ailleurs. D’autres études ont montré que cet accroissement concerne surtout les quartiers pavillonnaires, secteur qui se densifie le plus vite à Villejuif : des personnes âgées isolées s’en vont et cèdent leur pavillon à de jeunes couples avec enfants, qui parfois rajoutent une pièce, un étage… Mais cela veut dire aussi qu’il y a une demande pour des appartements HLM plus grands.
Villejuif a donc besoin de se rééquilibrer en « cadres et professions intellectuelles supérieures » (comme dit l’Insee). Évidement, il y a de forts contrastes de revenus (du simple au double) entre le quartier Lamartine/Lebon et le centre ville ou le Lion d’Or… Le prix des terrains reflète cette situation : entre les villes voisines très demandées (Arcueil, Gentilly) et Vitry.
Face à cette demande, en 2011, Villejuif comptait 24 626 logements. 34 % des habitants habitaient en « location sociale ». Pourtant, en 2013, selon l’Inventaire du logement social, qui vérifie que les villes respectent bien la loi dite SRU amendée Duflot (25 % de logement sociaux), la ville comptait 39% de logements sociaux ! C’est que la loi compte comme logement social les studios en foyers subventionnées suffisamment « indépendants ».
C’est un point important sur lequel je reviendrai : le logement social, ce n’est pas que l’appartement familial en HLM !
Alors faisons très attention et cessons de raconter des histoires. L’ancienne équipe nous accuse de chasser les classes populaires de Villejuif en détruisant le logement social. Voyons ce que disent les chiffres, pour les immeubles d’habitation d’au moins 300 mètres carrés (4 ou 5 appartements).
De 2008 à 2014, en 7 ans, 1578 de ces logements ont été livrés dont 31% en locatif social.
Au jour d’aujourd’hui, nous avons, déjà programmés jusqu’en 2018 (en 3 ans et demi) : 1430 logements, dont 30 % en locatif social. Mais à ces logements dits « familiaux » il faut encore ajouter les logements « « dédiés » (maisons de retraite, résidences étudiantes, résidence infirmière, résidence sociale)… 1019 logements, dont 68 % aidés !
Ainsi donc il n’y aucun ralentissement ni de la construction ni du social. Certes, une partie de ces programmes étaient déjà dans les tuyaux à notre arrivée. Nous nous sommes contentés d’imposer aux promoteurs des immeubles de hauteur plus raisonnable, et surtout de prendre en compte les besoins réels.
D’abord, du point de vue quantitatif. Il faut ajouter à ces chiffres ce qui se profile sur les deux nouveaux quartiers autour des gares Louis-Aragon et IGR, soit environ 3000 logements d’ici 2025, et l’opération de rénovation urbaine des quartiers sud où, pour améliorer la mixité sociale, nous comptons rajouter environ 500 logements non-HLM. C’est donc en réalité 6000 logements supplémentaires que nous programmons. Soit une augmentation du nombre des logements à Villejuif de 25 % ! C’est très au delà de ce que nous impose la Schéma directeur de l’Ile-de-France.
Ensuite, du point de vue social. L’ancienne majorité se plaint (ou se vante ?) de nous avoir légué 3900 demandeurs de HLM à Villejuif. Elle souligne que 70 % des habitants de Villejuif « y ont droit ». Par exemple : un ménage avec une personne qui travaille et 3 personnes à charge y a droit, si elle gagne moins de 6950 euros par mois, ce qui fait pas mal de monde… Bien sûr, il est financièrement très intéressant d’être dans un HLM, mais notre politique est de donner la priorité à celles et ceux qui en ont le plus besoin.
Car ces 3900 personnes ne sont pas actuellement à la rue, sauf quelques unes ! Mais certaines d’entre elles ont un besoin vital de trouver un logement social. En tant que maire adjointe en charge du logement, nous avons reçu, avec Annie Grivot (conseillère déléguée), beaucoup de personnes en situation dramatique, dont le cas n’avait pas été examiné depuis des années. Cela va des personnes handicapées qui vivent bloquées chez elles parce qu’on ne leur trouve pas de logement en rez-de-chaussée, en passant par les familles très pauvres qui s’entassent dans un petit appartement en loyer libre (ou chez des marchands de sommeil : on ferra une réunion spéciale sur ce sujet).
Et ce que je vois monter avec angoisse, c’est le problème des personnes vieillissantes pour lesquelles on n’a pas construit de maisons de retraite à loyer « social », ou la masse des jeunes qui cherchent à « dé-cohabiter » de chez leurs parents… Oui , nous avons besoin de logements sociaux, mais différenciés, avec ces fameux « logements dédiés ». Et à l’autre bout de l’échelle, pour les ménages n’ayant plus vraiment besoin d’une HLM : l’accession sociale à la propriété (que les Villejuifois vont actuellement chercher dans l’Essonne). Bref : construire de véritables « parcours résidentiels » pour le cycle de la vie. Y compris en organisant la mobilité interne au parc HLM de Villejuif.
Globalement, cela veut dire que nous proposons de garder et rénover tout le parc social existant, de s’en tenir à la règle « Duflot » des 25 % de HLM dans les nouveaux immeubles, et de développer les logements dédiés et l’accession sociale à la propriété, tout en réservant encore un peu d’espace (il n’y en a plus beaucoup) au pavillonnaire nouveau.
Un débat extrêmement riche s’ouvre ensuite. Je passe ici sur les interventions de l’ex-majorité qui, comme des robots, continuent à réciter « Vous voulez détruire les logements sociaux pour réduire leur part à 25% », comme si la première heure d’exposés n’avait pas eu lieu. Nous avons déjà raconté sa réaction à la nouvelle, tombée en pleine réunion et annoncée par le maire Franck le Bohellec : que Lamartine aura son Opération de Rénovation Urbaine. Espérons qu’il ne s’agissait que d’une réaction de dépit de ne pas l’avoir obtenue 10 ans avant, et qu’elle saura se monter coopérative dans l’intérêt des habitants.
Je passe aussi ici sur des débats très intéressants mais un peu hors-sujet "habitat" et qu’il va falloir traiter plus à fond. Par exemple : la place des jeunes, la place accordée aux filles dans l’espace public, les salles de réunions et d’activités associatives, le centre-ville et la cité Maurice Thorez, le terrain de la ludothèque prêté à la ville par les copropriétaires des Jardins de Villejuif, etc.
On suggère un referendum sur le PLU. Je ne suis pas contre, mais je fais remarquer qu’après une enquête publique où la population s’est exprimée massivement contre le PLU-Cordillot, les élections de mars ont été un quasi referendum pour un nouveau PLU.
Jean Ridel (de la ruelle Baudelaire insiste sur l’amélioration énergétique des bâtiments, et sur la multiplicié des bailleurs sociaux ( 32 à Villejuif ! ) Point que reprend M. Omnès (de la CNL) : ces bailleurs (hors l’OPH) n’appliquent pas des loyers très sociaux. Il s’inquiète de ce qui va se passer après la rénovation urbaine : les loyers vont-ils monter ?
Sur ce point je réponds en citant ce qui se prépare à Armand-Gouret. On va rénover (en construisant de plus petits immeubles pour les habitants actuels puis en rasant la barre) tout en visant le maintien de la somme « loyer+charges », car la rénovation doit permettre de grosses économies sur les charges. Pour les nouveaux habitants, ce sera plus cher que pour les anciens habitants de l’avenue du Gal Leclerc qui paient… 170 euros pour 3 pièces.
Étonnante intervention de M. Arrouche (maire adjoint aux finances de l’équipe Cordillot) qui s’affole du chiffre des 6000 logements nouveaux : « Ça ne sera pas soutenable ! Où trouverez vous des espaces verts pour cette population ? » Il était grand temps qu’il s’en aperçoive ! Ces chiffres traduisent déjà un ralentissement considérable par rapport aux folies du PLU-Cordillot. Déjà, systématiquement, dans les nouvelles demandes de permis de construire, j’impose des réductions (6 étages au lieu de 10, etc) par rapport à ce qu’autorise le PLU mis en révision, et nous avons abaissé à 2900 (au lieu de 3500) les logements prévus à Campus Grand Parc ! Et nous allons maintenir la surface totale du parc des Hautes Bruyères, et il n’y aura pas de tour de 14 étages au terrain Mollicone…
Il critique aussi notre insistance sur la mixité sociale : « Si on prend en compte tout le quartier [il veut dire sans doute : y compris la rue des Lilas ?] il y a déjà de la mixité sociale à Lamartine-Lebon ; si vous voulez de la mixité sociale au niveau des immeubles comment régler les problèmes de cohabitation ? » [sous-entendant que les classes moyennes de la tour Paul Bert n’accepteraient pas les incivilités de la jeunesse de Lamartine]. Il touche là un vrai problème , celui de la « fuite des classes moyennes « (y compris l’évitement scolaire), mais que le PLU-Cordillot avec ses 40 % de logement social dans chaque immeuble ne faisait que rendre insoluble…
Enfin, une intervention qui fera à coup sûr couler de l’encre. M. Coadou, employé municipal, me demande gravement : « J’ai un fils de 8 ans. Je ne sais pas ce qu’il fera dans 15 ans, mais je vous demande : que préparez-vous pour lui comme logement dans Villejuif ? » Je pourrais simplement lui répéter ce que j’ai dit au début, sur la diversification de l’offre de logement que nous préparons (y compris des logements pour étudiants). Mais en tant que mère de 3 enfants de plus de 23 ans, je préfère lui répondre sur le fond. « Il est possible, dans 15 ans, que votre fils, comme la plupart des jeunes de son âge, n’habite pas dans la ville de son enfance. Il fera des études quelque part, peut-être en province, et à la suite trouvera sans doute un emploi à proximité de son lieu d’études. Et je peux vous garantir que là, il trouvera des logements, tout de suite disponibles, beaucoup moins chers, beaucoup plus grands qu’en Ile de France ». Et je cite mon itinéraire personnel : née à Paris, études à Nancy et Montpellier, premier emploi à Montpellier, puis 3 villes différentes, et retour trente ans plus tard à Paris puis Villejuif il y a quelques années !
Tollé d’une partie de l’assistance. Notre voisin, Franck (de Potagers sans frontière) rétorque que ses grands-parents, maraichers, étaient déjà à Villejuif, qu’il veut rester près d’eux et s’en occuper : pas envie d’aller en province dans un « désert médical ». Je suis très sensible à cette intervention, qui nous rappelle que Villejuif était encore rural il n’y a pas si longtemps. Mais aujourd’hui la ville est peuplée d’habitants qui étaient en Bretagne ou au Portugal ou en Asie ou en Afrique quand ils avaient 8 ans. La question qui m’était posée n’était pas celle des « anciens enfants » du Villejuif rural, mais de la mobilité future de nos enfants de 8 ans, déjà branchés sur une culture au moins européenne et sans doute mondiale, et qui dans 15 ans voudront découvrir le vaste monde, et s’y faire une place… Et cela – la préparation à cette vie-là – interpelle certes notre équipe municipale, mais plutôt du coté de l’éducation et de la culture.
Notre PLU a une ambition plus modeste : préparer une ville où il fera bon vivre, pour tous les enfants et tous les ainés, d’où qu’ils viennent, où qu’ils soient nés.
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