Accueil > Thémes > Environnement > Géothermie : le derrick est arrivé !
Ça y est : le derrick qui va percer les puits de géothermie est arrivé dans la nuit du 7 au Juillet sur le terrain de la rue Jean Baptiste Baudin. Une ère nouvelle se lève pour l’écologie à Villejuif. Les travaux vont durer 4 mois environ.
C’est le recours à un gisement d’eau chaude naturel et renouvelable qui se trouve à 2 km de profondeur sous le plateau de Longboyau, de Villejuif à Orly. Cette eau à 90 degrés (qui a 170 millions d’années !) est pompée par un premier puits légèrement incurvé, échange sa chaleur avec un premier circuit en surface, puis est réinjectée dans le sous-sol par un second puits incurvé, à quelques centaines de mètres de son point de départ. L’eau rejoint ainsi son gisement de départ, et restera à en moyenne 5 ans sous terre avant d’être à nouveau pompée. Pendant ce délai, elle se réchauffe dans les profondeurs de la Terre et retrouve ses 90 degrés.
Le circuit de surface parcourt la ville et il échange à nouveau sa chaleur avec des circuits secondaires aux pieds des immeubles « branchés ». Le circuit secondaire fournit à l’immeuble de l’eau chaude pour le chauffage en hiver et, toute l’année, de l’eau chaude aux robinets.
Bien avant Villejuif, les autres communes du plateau de Longboyau s’y sont mises, avec Orly à l’avant-garde. En 2012 , Villejuif a été invité à se joindre au réseau initié 30 ans plus tôt par Chevilly et l’Haÿ-les-Roses, qui avaient déjà deux paires de puits et avaient besoin d’une troisième pour le temps de réfection des deux premières. Ce réseau est désormais la propriété d’un Syndicat Intercommunal de la Géothermie (SIG), et il est géré par une société publique locale, la Semhach. A la suite des élections municipales de 2014, j’ai été élu vice-président de ces deux organismes.
Dès 2004 la ville de Villejuif a été cliente du réseau Semhach. Venant des puits de Chevilly et l’Haÿ, une première branche de circuit primaire a été installée le long de la rue de Chevilly, qui atteint aujourd’hui la moitié de la rue de Verdun. De là, des antennes et réseaux secondaires ont permis d’alimenter les Lozaits, le stade nautique Youri Gagarine, le collège Karl Marx, l’hôpital Paul Guiraud, et plusieurs résidences en chemin.
Non, malheureusement. L’eau du circuit primaire de surface se refroidit au fur et à mesure qu’elle chauffe les immeubles. Il faut donc la réchauffer complémentairement, de point en point. Pour l’instant de deux façons :
par des chaudières à gaz très banales, réparties sur le circuit (il y en a une par exemple derrière la place Rodin)
par deux turbines à gaz de « cogénération ». C’est à dire qu’elles brûlent du gaz dans une tuyère pour produire de l’électricité (revendue à Edf), et les gaz brûlants, à la sortie de la tuyère, servent aussi à réchauffer l’eau du circuit de surface. Ces turbines sont sur Chevilly et l’Haÿ.
Sur la nouvelle paire de puits de Villejuif, on va innover : une pompe à chaleur industrielle ! L’idée est de refroidir l’eau qu’on va réinjecter dans les entrailles de la Terre jusque vers 25°, pour réchauffer encore un peu l’eau du circuit primaire. C’est le principe du réfrigérateur : donc ça consomme un peu d’électricité, mais ça évite de brûler beaucoup de gaz.
Et comment ! D’abord, pour la planète.
La chaleur, dans le réseau actuel, est produite à 58% par la géothermie, le reste en brûlant du gaz. Sans la géothermie, il faudrait tout chauffer au gaz ou pire, au mazout, avec les pollutions locales et l’effet de serre que ça provoque, alors que la géothermie est totalement propre. Avec la pompe à chaleur de Villejuif, la part du gaz va encore diminuer (certes on consommera un peu plus d’électricité, qui reste à 75 % nucléaire, mais ce n’est pas la faute de Villejuif).
Rentable aussi pour les usagers ! La Semhach étale le coût du branchement sur 15 ans, dans la facture de l’usager (par exemple une société Hlm ou une résidence). Pendant ces 15 ans, le coût du chauffage est 20 % plus faible pour les usagers que le chauffage au gaz. Au bout de 15 ans, la baisse est de 40 % ! Une sacrée réduction de charges.
Rentable pourtant pour l’ensemble Semhach-SIG…
Prenons la dernière année, 2013. L’électricité achetée pour actionner les pompes et le gaz acheté pour les chaudière et les turbines ont couté à la Semhach 6,5 millions d’euros . La cogénération a permis de revendre de l’électricité pour 5 millions d’euros à Edf. La vente de l’eau chaude a rapporté 10 millions d’euros. Une fois payées les charges financières (le remboursement des emprunts), les salaires, les taxes et les réparations courantes (les fuites…) il reste environ 5 millions, que la Semhach reverse au SIG à titre de loyer, et avec ces 5 millions le SIG investit pour augmenter le réseau !
Donc, pendant 4 mois environ, on va creuser deux puits et ça va faire du bruit sans arrêt. Le derrick travaille sans interruption, nuit et jour !
Et deux fois, pendant une journée, l’eau pré-historique sera à l’air libre, et elle pue l’H2S, l’œuf pourri. J’ai proposé qu’on distribue des flacons-souvenirs de cette eau « Jurassique Parc de Villejuif » !
Infernal ? Bof. Ce terrain est exceptionnellement bien isolé, par rapport aux puits déjà creusés à L’Haÿ, Chevilly, Arcueil, etc. C’est un terrain prélevé sur l’ancien cimetière dit « des Indigents », et déclassé (on a quand même retrouvé quelques crânes, reversés à la fosse commune…). Ce terrain a ensuite été partagé en deux, et la Semhach avec les puits de géothermie seront dans la moitié du fond par rapport à la rue JB Baudin.
(Au premier plan, le cimetière des Indigents, à gauche la rue Grosmesnil, au fond la rue JB Baudin, au milieu le derrick, et, dans l’ombre du derrick, la moitié du terrain destinée à devenir jardin public.)
Une fois creusés et branchés, les puits disparaissent (plus de derrick, juste de gros robinets sous une grille) et sont totalement silencieux. Mais il faut encore construire l’usine proprement dite qui comprend les pompes, les échangeurs de chaleurs… Ça durera de décembre à octobre 2015. Et zou ! on branche au réseau.
L’usine, dans sa version définitive, a été présentée aux riverains de la rue JB Baudin le 25 juin et aux conseillers municipaux le 4 juillet. C’est un long bâtiment plat, aux murs supérieurs de verre, avec un toit en pente douce végétalisé (hauteur maximale un peu plus de R+ 1)
Des habitants des pavillons de la rue nous ont fait observer qu’ils ne pourraient pas profiter de la géothermie (un branchement coûte 50 000 euros, ça ne vaut pas le coup pour un pavillon), contrairement par exemple aux habitants des immeubles collectifs de la rue, qui eux vont être branchés. Or ils vont subir le voisinage des travaux. Quel intérêt pour eux ?
D’abord, ils vont bénéficier, comme tous les Villejuifois, des avantages généraux de la géothermie : les économies de pollutions locales et à l’échelle de l’atmosphère (moins de mazout et de gaz sera brûlé dans Villejuif), les économies de coûts pour le chauffage de tous les bâtiments publics, ce qui va aider à redresser la situation financière de la ville, catastrophique…
Ensuite, il est vrai qu’ils vont subir des mois de travaux, essentiellement pendant les vacances : les enfants de Joliot-Curie ne seront pas là pendant 2 mois. Mais ils vont bénéficier définitivement d’un jardin public et d’une salle de quartier, qui vont être installés sur la première moitié du terrain, le long de la rue. De même, les places de parking boueuses de la rue seront remplacées par un parking en épi, en face de chez eux.
Ce jardin public fera un écran définitif devant tous les immeubles de grande hauteur qui pourront être construit au delà, comme le foyer d’infirmières, de 6 étages, qui va être reconstruit derrière l’usine (laquelle ne fait pas plus que 2 étages). Nous songeons à y mettre un potager partagé, pour les enfants de l’école Joliot-Curie. Il comprendra un petit local qui servira à la fois de centre d’exposition pédagogique sur les énergies alternatives et de salle de réunion à la disposition du quartier !
Quant aux bruits de l’usine, c’est à dire le bruit du ventilateur de la pompe à chaleur et le bruit des machines, je vous invite à vous rendre devant l’usine « mère » de la Semhach, 9 rue du lieutenant le Coz à Chevilly-Larue, qui a plus de trente ans, construite avec de vieilles techniques, au milieu d’un grand ensemble : à peu de distance du portail, on n’entend rien !
Alors, nos ennuis seront finis une fois l’usine construite et branchée aux puits ? Hélas non.
D’abord il faut la relier au réseau principal, qui s’arrête pour le moment à mi-chemin de la rue de Verdun. Et on ne sait pas actuellement par où faire passer les tuyaux. Les tranchées font une demi-rue de large, et le sous-sol des rues de Villejuif est déjà très encombré… Cette question sera réglée vers octobre-novembre, et ensuite il faudra creuser la tranchée, par segments successifs de 3 semaines de travaux, soit 3 mois au total.
Ensuite, eh bien, il faudra brancher autant d’immeubles que possible, pour faire le maximum d’économies. Or il faut avoir un point en tête (qui avait été pris en compte dès l’origine par L’avenir à Villejuif : le creusement de la station Louis Aragon du Grand Paris va transformer en enfer la circulation dans Villejuif-sud pendant plusieurs mois ! L’avenue Louis Aragon sera coupée, du carrefour Jean-Jaurés au carrefour Maxime Gorki, par un trou de trente mètres de profondeur…
Bien sûr, contrairement à ce que disent certains, nous nous réjouissons tous d’avoir et la géothermie, et un nouveau métro ! ça ne nous empêche pas de réfléchir depuis deux ans à la façon de rendre ces chantiers les plus vivables possible pour les Villejuifois.
Il est probable que pendant les travaux à Louis Aragon, beaucoup d’automobilistes tenteront de contourner ce chantier par le sud (avenue Karl Marx, etc). Il ne faudra donc pas rajouter des travaux aux travaux, dans ce secteur.
Voici ce que nous proposons : faire le maximum de branchements de géothermie au sud de l’avenue de la République avant l’ouverture du « trou » du métro, puis de ne plus en faire (sauf ceux qui ne nécessitent pas de tranchées dans les rues) jusqu’à ce que le métro soit terminé. Pendant ce temps là, les nouveaux branchements de géothermie concerneraient exclusivement le nord de l’avenue Paul Vaillant-Couturier.
3 Messages
20:01
Merci pour cet exposé pédagogique et écologique devant permettre de réduire les dépenses municipales.
Ces économies ont-elles été chiffrées ?
La Semhach distribuera ses profits dans le budget communal et non à la bourse de Paris.
Elle a une expérience de 30 ans dans le domaine, ceci semble une garantie de sécurité pour le futur.
La programmation des travaux et les dates de raccordement des batiments communaux doivent faire l’objet de discussion au sein des services techniques. Quels seront les immeubles raccordés et quand ?.Les villejuifois accepteront trés rapidement des travaux qui permettent de faire des économies !
La géothermie semble donc un bon tuyau pour les villejuifois.
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00:45
Merci Jean !
Justement, la programmation des raccordements futurs pose le problème très difficile de la coordination avec les "trous" du métro Grand Paris, les choix qu’ils impliqueront sur les déviations de la circulation dans Villejuif -sud, mais aussi il faut connaitre le trajet exact du circuit principal entre la rue de Verdun et la rue JB Baudin. On en saura plus en septembre et la discussion se précisera à ce moment-là.
En attendant on se mobilise pour limiter les bruits de chantier sur le double puits, dont le creusement a commencé.
A propos des profits de la Semhach : ils sont tout petits (28 000 euros l’an dernier) parce qu’en réalité reversés sous forme de fermage au Syndicat intercommunal qui finance le puits et le réseau. Mais quand même , 8000 euros seront versés en dividende à Villejjuif, et nettement plus l’an prochain.
Quant aux économies pour la ville, cela dépend de ce qui va être banché (mais on cherche à faire faire des économies tout aussi prioritairement aux habitants des immeubles, en particulier à l’OPH), c’est en effet une bonne idée de les chiffrer en valeur absolue
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08:43
J’ai trouvé sur internet le document de synthèse du permis de recherche et de la demande d’ouverture de travaux d’exploitation (PER-DOTEX)
Tout de même, le chantier émets des nuisances cet été...
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