Accueil > Actualités > La grève chez les agents de Villejuif
La semaine dernière, des agents de Villejuif étaient en grève, sur tout un paquet de revendications. Une rencontre entre notre groupe et les organisations syndicales, CGT et CGT-cadres, a eu lieu vendredi à leur demande. Elle nous a permis de mieux cerner les inquiétudes du personnel et de faire en bureau municipal des propositions qui ont recueilli l’unanimité. Un accord a été conclu lundi matin avec le maire, mais la situation est restée chaotique.
Ce n’est pas la première fois que nous rencontrons les syndicats. Il y a quelques semaines, nous nous étions rencontrés à la demande de nos délégués en Commission Technique Paritaire (la principale structure légale du dialogue social), Monique Lambert et Alain Lipietz. Nous voulions comprendre pourquoi les votes en CT aboutissaient systématiquement à un vote « contre » des représentants du personnel, alors que, il y a un an, le dialogue social débutait dans une certaine cordialité. Les syndicats avaient exclusivement mis en avant des problèmes de forme : les multiples violation de la loi et du règlement de la CT, l’incapacité du maire à tenir un rythme de dialogue régulier se concluant par de vraies décisions, leur donnait l’impression (fausse) d’être méprisés.
La grève du personnel reprend ces questions de forme mais ajoute une liste de contenus. Lesquels font blocage ?
Vendredi 4, en début d’après midi, les syndicats, qui ne souhaitent évidemment pas voir la grève s’éterniser dans la situation tendue de la France et de la Ville, demandent à nous rencontrer pour nous le dire, avant la réunion des élus de l’Union citoyenne. Natalie Gandais, Monique Lambert et Patrick Stagnetto (tous membres de l’exécutif) se dégagent pour les recevoir.
La délégation syndicale évoque essentiellement le CASC, puis le stationnement des agents (si nous avions eu le temps, on aurait pu approfondir d’autres problèmes.)
Le Comité d’Actions Sociales et Culturelles de la Ville de Villejuif est l’association qui gère les œuvres sociales de la municipalité. La convention qui le lie à la Ville est à renouveler fin décembre, et la négociation dure depuis l’été.
Tous les employeurs ont le devoir de financer des « œuvres sociales » pour leur personnel. Dans le cas d’une ville, l’employeur, c’est les habitants, représentés par la municipalité : par leurs impôts locaux ils financent ces œuvres sociales. Mais le boulot (gérer ou trouver des villages de vacances, distribuer des primes pour les grands évènements de la vie, etc) est fait par une structure, souvent associative, spéciale à l’entreprise ou à la ville, ou mutualisée entre de nombreuses villes ou entreprises.
Donc, pour notre ville, c’est le Casc. Regadez sa page de présentation. Petite bizarrerie : elle précise que « Les administrateurs du CASC veuillent aux respect des orientations définies par la CGT, dont ils sont élus, quant aux activités sociales et culturelles qui vous sont proposées. » C’est donc une structure organiquement liée à la CGT, alors qu’elle n’est pas financée par les cotisations des syndiqués CGT, ni sur la masse de salariés, mais par les contribuables. Le catalogue de ses services est là.
Le coût de ces œuvres sociales pour les Villejuifois (subvention au Casc et mise à disposition de locaux et d’agents, plus quelques prestations offertes directement par la Ville) était, selon les calculs de la Direction des ressources humaines, de 637 909 euros en 2015. Lors des négociations, les demandes syndicales ont oscillé entre 592 597 et 771 978 euros.
Ce qui est évidemment impossible. La Ville voit en effet ses ressources financières diminuer considérablement, soit par la politique du gouvernement socialiste visant à contraindre les villes à une politique d’austérité (augmenter les impôts et diminuer les dépenses), soit de par l’héritage de la gestion communiste qui s’accroit de mois en mois. Tantôt nous découvrons que les impôts locaux du Crédit Lyonnais, qu’on nous présentait comme une aubaine pour la ville, seront diminués de 700 000 euros par an, tantôt les spéculations monétaires sur le franc suisse et les emprunts toxiques contractés à l’époque de Mme Cordillot explosent, tantôt nous découvrons la bombe à retardement des « portages toxiques ».
Comme la masse salariale continue d’augmenter (par « glissement vieillesse et technicité »), et comme nous essayons de limiter au maximum la hausse des impots, nous devons faire des économies sur tout.
Mais nous ne voulons pas diminuer le niveau des œuvres sociales, car nos agents sont en grande majorité de « bas salaires ». Au contraire : alors que moins de la moitié des salariés ont recours au Casc, nous souhaiterions que les œuvres sociales que nous finançons attirent 80 % des agents. Nos responsables DRH ont donc cherché un gestionnaire d’œuvres sociales offrant « mieux pour moins cher » et ont examiné la solution adoptée par de nombreuses villes (dont beaucoup communistes ou socialistes) : le Comité National d’Action Sociale, qui peut offrir « mieux pour moins cher » parce qu’il mutualise les dépenses entre de nombreuses villes.
Un coup d’œil sur le site du CNAS montre que les avantages pour les salariés semblent considérables (par exemple la variété des vacances sociales et solidaires proposée aux petits budgets-famille), et bien supérieurs à ceux du CASC.
Quant au coût pour les Villejuifois, en ajoutant à l’adhésion au CNAS un salarié permanent avec bureau dans les locaux de la municipalité, pour faire l’interface entre le CNAS et les agents, il se monterait à 376 468 euros.
L’économie réalisée par un remplacement du Casc par le Cnas se monterait donc à 261 000 euros par an.
En conséquence le « bureau politique » (qui coordonne les 4 groupes politiques constituant la majorité municipale) s’était orienté, à l’unanimité, vers la proposition du Cnas, avec évidemment une période de débats et de comparaisons parmi les agents.
Au cours des négociations, les délégués syndicaux ont rétorqué aux maires-adjoints concernés (Philippe Vidal pour le budget et Laurence Loudière pour les ressources humaines) que le sujet du CNAS n’était pas à l’ordre du jour et qu’ils voulaient discuter seulement des conditions du renouvellement de la convention avec le CASC, pour deux ou trois ans.
Ce que viennent nous dire les délégués syndicaux ce vendredi, ce sont les doutes des salariés sur le type d’œuvres sociales qu’offre réellement le Cnas : n’est-ce pas trop « haut de gamme », pour des salariés cadres des grandes villes ? etc. etc.
Nous comprenons cette démarche comme une ouverture de leur part : ils veulent bien discuter du Cnas, pour vérifier qu’aucune offre intéressante du Casc ne disparaisse avec le Cnas. De toute façon, le bureau politique a prévu que dans ce cas, une partie des 260 000 euros d’économie serait consacrée à financer des compensations.
Nous partageons volontiers leur souci. Monique (ancienne salariée du Pôle emploi) raconte que le dialogue social a duré un an pour changer de mutuelle, avant le vote final des salariés. Patrick, délégué ouvrier CGT de l’automobile au niveau Ile de France, raconte la même chose sur le choix du gestionnaire des œuvres sociales, avant le vote des 58 garages de son entreprise.
Cela implique de se donner encore du temps, jusqu’en septembre par exemple, même si ça coute encore trop cher à la ville, mais assez tôt pour faire profiter les agents de nouveaux avantages.
Les délégués syndicalistes abordent ensuite la question des parkings. Il n’est pas juste, disent-ils, que les « petits salaires » qui viennent de loin payent les parcmètres dans la rue (140 euros par mois) . Il est très important pour eux d’avoir accès à des parkings municipaux, comme les 50 places réservées du « parking paysager » derrière Pablo Neruda. Or, disent-ils, ces places ont été de tout temps attribuées à des privilégiés... la plupart Villejuifois, donc n’ayant pas vraiment besoin de voiture.
Sur ce point, Natalie Gandais, en tant que déléguée au patrimoine, les rassure immédiatement.
S’agissant des agents du pôle technique, elle explique ce qui va se passer rue Ambroise Croizat : il y aura toujours un parking pour les agents. Pendant les travaux de la résidence étudiante sur le 107 Ambroise Croizat, les agents pourront se garer sur le site du 102 rue Ambroise Croizat (en attendant la construction de l’EPAHD), et si la situation de l’EPEHD se débloque avant la fin des travaux de la résidence étudiante et la livraison de notre parking souterrain, on pourra trouver un accord avec les Esselières sur leur nouveau parking provisoire, rue du 12 février.
S’agissant des agents travaillant en centre-ville, Natalie annonce qu’après 18 mois de négociations elle est enfin parvenue à sortir la ville de l’embrouille du parking Paul Bert. Depuis longtemps la Ville possède 130 places dans ce parking... très peu utilisées en raison de l’insécurité. Et.... Les travaux de sécurisation ne peuvent pas intervenir tant que les chicanes administratives entre les copropriétaires de l’ex-ZAC Paul Bert (la Ville, l’OPH et une copropriété privée) ne sont pas résolues. Laquelle Zac Paul Bert était une opération de la Semasep, qui avait fait faillite et avait été remplacée par Flobail.... Certes, le passif n’est pas réglé, (« 30 boîtes d’archives non triées », lui a-t-on expliqué). Mais enfin ça y est : le règlement de copropriété est d’aplomb, les travaux de sécurité vont se faire, nous aurons accès à nos 131 places de stationnement, on devrait pouvoir offrir suffisamment de places aux agents tandis que les 50 places du parking en plein air de Pablo Neruda seraient ouvertes au public.
Quant aux modalités d’attribution des places de parking, Natalie découvre à cette occasion qu’il existe un problème...
Aussitôt après, l’ensemble des élus de l’Union citoyenne se réunit en bureau municipal, salle du Conseil . Dehors, une cinquantaine de syndicalistes et de militants communistes manifestent en chantant. Le Maire suggère de prolonger la convention avec le CASC jusqu’à l’été prochain. Natalie Gandais soutient la proposition : il faut prendre le temps d’ accompagner le personnel dans la comparaison entre ce qu’offre le CASC et ce qu’offre le CNAS. Les élus de l’UC adoptent à l’unanimité cette proposition. Le maire et l’adjointe au ressources humaines sortent annoncer cette décision aux manifestants, qui semblent l’apprécier et se dispersent.
Lundi 7 au matin, à l’issue d’une septième séance de négociations, un protocole d’accord est conclu entre les deux parties. Le voici :
Par ailleurs, alerté depuis trois semaines par nos élus en Conseils d’école, la direction générale des services a « resserré les boulons » sur certains problèmes matériels : les produits d’hygiène sont correctement distribués dans toutes les écoles, une convention a été passé avec une entreprise d’insertion pour assurer un remplacement chaque fois que 2 agents étaient manquant dans une école (sous l’ancienne majorité nous avons vérifié qu’il pouvait y avoir jusqu’à 4 agents manquant sans remplacement), etc.
Fin de la grève ? Hélas non. Dans la matinée, d’autres syndicalistes se répandent en affirmant que rien n’est signé. Un tract est distribué appelant à « durcir le mouvement ». Le voilà :
De fait, quelques écoles se retrouvent sans service de cantine, ni activité de loisir. Les directrices de plusieurs groupes scolaires, en particulier dans les quartiers populaires, s’avouent incapables de dire aux parents ce qui se passera à midi. (Rappelons que dans un tiers des cas il s’agit de mères seules et qui travaillent...)
Isabelle Hamidi, une de nos élues, institutrice aux Lozaits, demande à une agent pourquoi il y a grève. « Parce qu’on nous dit que le maire veut supprimer le CASC et nos primes, afin de payer une police municipale ».
A ce niveau de « dialogue social », il n’y a plus qu’à tirer l’échelle et s’accrocher au pinceau. Le 8, les syndicats annoncent que la grève est "suspendue"….
Post-scriptum du 10 janvier 2016 .
Ultérieurement , le conseil municipal de décembre vote le compromis sur le CASC : reconduction de la convention jusque fin aout 2016, le temps de discuter avec tous les agents et les organisations syndicales des avantages et des inconvénients éventuels de la solution CNAS. Peu après les syndicats ratifient le compromis.
La question lancinante des fournitures (papier cabinet, produits d’entretien) dans les écoles a fait l’objet de plusieurs visites directes du directeur des services et de Natalie Gandais (responsable des stocks de fourniture ) dans les quelques écoles "à problème", ce qui a permis, dans une franche discussion avec les agents d’entretien, d’éclaircir et de rectifier certains dysfonctionnements.
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