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Conseil municipal du 11 avril 2018
À la reprise du conseil interrompu le 3 avril, le maire explique qu’il s’agissait d’éviter aux élus d’opposition qui demandaient une protection fonctionnelle de « commettre un détournement de fonds publics ».
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On se souvient peut-être que lors du conseil du 3 avril, au moment de voter à une heure du matin la protection fonctionnelle pour 5 élus de la majorité (rapport 18-04-102), le maire s’était octroyé une suspension de séance. C’était la première fois depuis presque un an qu’il accordait, bien sûr à sa propre majorité, une suspension de séance, alors qu’il la refuse systématiquement à l’opposition. La suspension de séance est pourtant de droit, mais ne doit pas durer plus d’un quart d’heure.
Au bout de 20 minutes d’attente, le maire et ses partisans n’étaient toujours pas revenus. Peu à peu, les plus fatigués des élus de l’opposition sont partis. Les derniers restés ont vu revenir les élus de la majorité se disputant entre eux, mais il n’y avait plus le quorum (la moitié des élus présents physiquement). Le conseil a donc été ajourné au 11 alors qu’il ne restait plus que deux points : celui-là, et la répartition des subventions au mouvement associatif sportif.
À la reprise du 11 avril, le maire explique que cette suspension de séance visait à… éviter à l’opposition de commettre « la faute pénale de détournement de fonds public ».
Quoi, quoi, quoi, quoi ?
Au cours du conseil du 3 avril, les élus d’opposition ont eu à faire face à deux choses.
D’une part, il y a cette demande de protection fonctionnelle de la part des 5 élus de la majorité. Il s’agit de l’obligation pour une ville de protéger ses élus menacés dans l’exercice de leur fonction, entre autres par une plainte en diffamation, notamment en assumant leurs frais d’avocat. C’est très bien expliqué là, dans ce rapport 18-04-102 mis aux voix :
De quoi étaient menacés ces 5 élus de la majorité, qui demandent donc aux contribuables de payer leurs frais d’avocats ? On ne nous le précise pas… Ph. Vidal sur le site de son groupe, pense que cela vise les ricanements par lesquels il avait salué les copieux frais de formation que s’accorde la majorité… et la comparaison, outrageuse aux yeux de Mme Berton , avec Claudia Cardinal et Brigitte Bardot. Leurs plaintes aux pénal sont déjà classées sans suite.
D’autre part il y a la multiplication des menaces du maire contre certains élus d’opposition à qui sont reprochées leurs critiques publiques, leurs signalements au Procureur de la République ou au tribunal administratif des délits, fautes et irrégularités dans la gestion de la ville. Or ces menaces du maire tombent exactement dans le cadre de raisons pour lesquelles la loi accorde aux élus la protection fonctionnelle, raisons et que résume fort bien le Dalloz (référence en matière de droit) :
La loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000 a d’abord consacré l’obligation des collectivités d’accorder leur protection à leurs élus faisant l’objet de poursuites pénales à raison de faits non détachables de l’exercice de leurs fonctions. La loi n° 2002-276 du 27 février 2002 a ensuite élargi le champ de cette protection fonctionnelle, en obligeant les collectivités à protéger également leurs élus « contre les violences, menaces ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions » et à réparer les préjudices en résultant.
Du coup plusieurs élus de l’opposation déposent en pleine séance du 3 avril une demande de protection fonctionnelle, à rajouter à la liste du rapport 18-04-102. C’est le cas bien sûr du groupe L’Avenir à Villejuif, particulièrement visé depuis deux ans par les menaces du maire.
On comprend que ces demandes aient semé le trouble dans la majorité, d’où la suspension de séance : comment justifier de payer les avocats des uns et pas ceux des autres ??
Et donc, en cette reprise du 11 avril, le maire déclare… que les conseillers municipaux d’opposition ayant demandé la protection fonctionnelle prennent le risque d’une « ‘faute pénale ».
Et pourquoi ? Parce que, dit-il, ils ne sont que conseillers municipaux de base et n’auraient « donc » pas droit à la protection fonctionnelle. Pourtant le rapport 18-04-102 est très clair : « Le Conseil d’État précise que tous les élus locaux peuvent bénéficier de protection fonctionnelle » dans le cadre de leurs actions « non-détachables de leurs fonctions. »
Et notamment dans tous les cas où, faisant leur boulot, ils signalent au Préfet et à la Procureure de la République les soupçons de délits et irrégularités du maire, ils affirment en conseil municipal que le projet de budget est insincère etc. Ce que justement leur reproche le maire, en les menaçant de procès en diffamation…
Dans la foulée, le maire les appelle à retirer ou confirmer leur demande de protection fonctionnelle (à leurs risques et péril) et annonce que le rapport 18-04-102 est retiré et sera présenté à une autre séance.
Or, comme nous l’avons écrit à propos du signalement par Natalie Gandais à la Procureure de la République de l’affaire de la Halle des Sport (voir le point 12), la situation est en train de changer en protégeant mieux les lanceurs d’alerte. La loi « Sapin 2 », article 13, précise en effet :
I. - Toute personne qui fait obstacle, de quelque façon que ce soit, à la transmission d’un signalement aux personnes et organismes mentionnés aux deux premiers alinéas du I de l’article 8 [les suprieurs hiéarchiques , c’est à dire ici le préfet, et la justice] est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
II. - Lorsque le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction est saisi d’une plainte pour diffamation contre un lanceur d’alerte, le montant de l’amende civile qui peut être prononcée dans les conditions prévues aux articles 177-2 et 212-2 du code de procédure pénale [contre les plaintes en diffamation abusive] est porté à 30 000 €.
Bref… Alain Lipietz et Natalie Gandais confirment leur demande de protection fonctionnelle. Avec copie à M. le Préfet et à Mme la Procureure de la République !
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