Accueil > Actualités > L’Europe, les villes et les migrants
Le débat co-organisé par EELV Villjuif et Vitry sur la question « L’Europe et les migrants » a permis une confrontation passionnante entre les différents niveaux territoriaux de l’engagement humaniste (chrétien, socialiste ou écologiste) en faveur de l’accueil.
Damien Carême (3e de la liste Jadot et maire EELV de Grande Synthe, banlieue de Dunkerque) a d’abord raconté sa longue bataille contre les ministres de l’intérieur socialistes (Cazeneuve, attentif) et macroniste (Coulomb, épouvantable : « Les migrants doivent apprendre qu’ils ne seront pas les bienvenus en France ! »).
Il voulait maintenir à Grande Synthe un accueil digne pour quelques 1500 personnes en moyenne cherchant à passer en Angleterre, largement aux frais des collectivités locales (8000 foyers à Grande Synthe). Il a souligné le caratère exceptionnel de la crise de 2015-2016 due à un empilement de guerres (Syrie-Irak, Soudan, Érythrée). La politique répressive de la France n’a fait qu’enrichir les passeurs : de 500 euros pour le passage en 2014 à 14000 euros aujourd’hui.
Surtout il a montré que , quand la population est prévenue et informée, « ça se passe bien » avec un élan de générosité chez les « accueillants ». Pour éviter les réactions « Les Français d’abord », dans une ville où 30% des familles sont au dessous du seuil de pauvreté, il faut agir sans discrimination pour toutes les personnes en difficulté. Les refuges doivent être ouverts aux SDF, femmes battues etc.
Damien Carême a institué un « Minimum garanti complémentaire » pour assurer à tous ses habitants de dépasser le seuil de pauvreté (850 euros par unité de consommation), qu’il finance par... les économies sur l’éclairage (480 000 euros pour 7000 lampadaires), la récupération de la chaleur des usines locales etc. L’écologie, ça ne crée pas seulement des emplois, ça finance la solidarité !
Résultat : face à ses collègues, maires des autres villes du département du Nord qui lui disaient « Tu va faire monter le Front National », il montré la carte des votes au premier tour de la présidentielle 2017. Le Nord est couvert de « noir » (Le Pen en tête) sauf une tache bleue (la droite en banlieue chic de Lille) et une tache rouge : Mélanchon en tête... à Grande Synthe ! Son meilleur souvenir : voire une retraitée nonagénaire appuyée à son déambulatoire, venue offrir ses services pour les réfugiés.
Annie Lahmer, de Nogent, ville bourgeoise, élue régionale EELV, a dénoncé la cruauté anti-solidaire de la politique de Valérie Pécresse (présidente de la région IdF). Mais surtout elle a raconté son expérience à Nogent. Quand le maire a su que le gouvernement installait un centre pour réfugiés à Nogent, il a provoqué la panique des habitants en les « mettant en garde ». Elle, avec « ses copines » , a organisé l’accueil. Elle a été soutenue par la « générosité bourgeoise » : des médecins, dentistes, kiné, se sont mobilisés pour s’occuper des réfugiés ! Ce que voyant, le maire, lors de la seconde vague, l’a appelée au téléphone : « Je compte sur vos réseaux pour les accueillir ! »
Une discussion s’engage avec Jacques Perreux, de Vitry, qui confirme cette disponibilité des gens de toutes catégories sociales. Il est aussi une des animateurs du Festival de la Roya. La vallée de la Roya, à la frontière franco-italienne, où il passe une bonne partie de son temps, et où la gendarmerie française tente d’intercepter les migrants pour les renvoyer en Italie. Pourtant Macron et sa première de liste Loiseau prétendent que leur politique migratoire vise à « décharger les pays -frontières » comme l’Italie de l’afflux de migrants I
Il souligne que les gens, à Vitry comme à la Roya, sont spontanément « ambivalents » : ils peuvent accueillir les migrants le matin avec des pains au chocolat et le soir avec des pierres s’ils sont excédés. Tout dépend donc des pouvoirs publics.
J’interviens en tant qu’ancien député européen pour souligner que l’Union européenne se donne les moyens d’une politique « généreuse » mais que tout dépend des responsables poliques qui l’appliquent. Frontex était conçue comme une force de sauvetage des réfugiés mais, sous l’influence des chefs de gouvernements, elle est devenue une armada pour renvoyer les boat people vers les milices esclavagistes et tortionnaires de Libye.
Ancien président de la Délégation pour la Communauté andine, j’ai évoqué les « laboratoires de paix » que l’UE a pu financer en Colombie, au Pérou, ravagés par les guerres civiles, avec des millions de réfugiés internes. J’ai raconté notre visite (avec Natalie Gandais) au camp de réfugiés des Canaries : là ce sont des pêcheurs artisanaux qui cherchenet à gagner l’Europe en pirogue. Ils ont été ruinés par… la politique d’encouragement à la pêche industrielle de l’Europe !
C’est LE grand problème de l’Union. Elle vote sans arrêt « des plans écologiqes » ou humanitaires, jusqu’à 2030, mais pas « une planification écologique » mettant en cohérence ces différents « plans ».
Le débat débouche alors sur ce que devrait etre, selon les Verts Européens, la politique d’accueil de l’UE. Car même si la crise migratoire de 2015 est derrière nous, il y aura toujours un flux migratoire, accéléré progressivement par le réchauffement climatique. Que faire ?
D’abord en finir avec le Règlement de Dublin qui cantonne les migrants dans le pays d’arrivée (Grèce, Italie, Espagne, Malte). Il faut les laisser libres de rejoindre leur famille, et viser à les répartir dans tous les pays de l’Europe en proportion de leur population et de leur richesse. Mais les pays de l’Est, pour des raisons historiques, ne veulent pas. Il faut, premièrement, convaincre et, en second lieu, ajuster la solidarité européenne à l’égard de ces pays à leur propre bonne volonté à se montrer solidaires : un « bonus » de soutien des Fonds européens aux pays qui se montrent le plus accueillants.
Je rappelle qu’en 2015, quand l’Allemagne accueillait 1 million de réfugiés, la France de F. Hollande n’en acceptait que 24 000. Le land du Bad-Wurtemberg, gouverné par les Verts allemands, en a accueilli 200 000 et, trois ans après, la majorité d’entre eux avaient un emploi.
Natalie Gandais était alors 1ere adjointe. Elle a dit au maire de droite de Villejuif : « Villejuif = un millième de la France, on dit au préfet qu’on en prend tout de suite 24 !" Le maire a répondu : « D’accord , mais pas de buzz ! ».
Tu parles ! 24 personnes = 4 ou 5 logements. On oublie toujours que 2 millions de réfugiés, ça fait 0,4% de la population européenne. Pas de quoi crier au Grand Remplacement !
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